NOTE DE PRESENTATION
" La Justice et la transition démocratique"
Depuis quelques années, le Maroc subit des transformations profondes qui touchent le champ politique, économique et social. Le Marocain est de plus en plus conscient de ses droits, et n'hésite pas à les revendiquer. On constate une transformation sociale indéniable, par l'accession de nombreux Marocains à un statut intellectuel, économique et social, qui en fait des acteurs de la vie politique et non plus de simples spectateurs. En témoigne l'extraordinaire vitalité de la société civile marocaine, qui est probablement l'une des plus dynamiques dans le monde arabe.
La démocratie, c'est la liberté de l'individu, le pluralisme des idées et la diversité des opinions. C'est accepter de vivre ensemble, en gérant les conflits de manière pacifique. En un mot, c'est respecter l'autre. De même, la démocratie repose sur l'égalité des droits et des devoirs.
La loi est le bouclier qui protège l'individu contre ceux qui peuvent vouloir abuser d'une situation de pouvoir pour lui imposer arbitrairement leur volonté. La loi est le recours entre les mains des justiciables, qu'il s'agisse d'un différend entre individus isolés ou entre un individu et le pouvoir de l'Etat.
Une justice impartiale est une justice identique pour tous. L'indépendance de la justice vis- à- vis de tout pouvoir est une condition nécessaire de son impartialité. C'est pourquoi les Etats modernes démocratiques ont instauré le critère de séparation de la justice des autres pouvoirs, exécutif ou législatif.
Pour mieux garantir l'équilibre des pouvoirs, le statut de la presse garantit sa liberté d'action et en fait un contre-pouvoir efficace contre les dérapages et les abus.
Parallèlement, on constate que le Maroc se transforme de manière encore plus radicale et plus rapide, en s'inscrivant de manière volontariste dans la mondialisation, et en signant des accords de libre-échange avec de nombreux pays. Le Maroc est devenu un gigantesque chantier, attirant les investisseurs nationaux et internationaux. Le premier souci d'un investisseur est la sécurité juridique, qui passe par une justice compétente capable de protéger ses droits et de régler les différents économiques qui peuvent surgir entre les partenaires. Une justice diligente, pour permettre à l'entreprise de continuer à jouer son rôle de moteur de développement dans les meilleures conditions.
La modernisation a commencé avec la création de tribunaux spécialisés (tribunaux administratifs et commerciaux); mais les changements sont difficiles à mettre en pratique, en raison du manque de magistrats spécialisés et de la faiblesse numérique des ressources humaines et matérielles.
Si dans les textes les magistrats sont indépendants, la pratique montre que le Ministre de la Justice exerce une influence importante sur l'évolution de la carrière des magistrats, soit directement, soit par le biais du Conseil Supérieur de la Magistrature.
Si la réforme de la Justice a d'abord été une revendication politique, pour asseoir l'Etat de Droit, elle est aujourd'hui aussi une revendication économique, à même d'assainir les relations entre partenaires économiques et promouvoir l’investissement et le développement.
Si la moralisation est une condition indispensable d'une justice impartiale, elle suppose aussi que la situation matérielle des magistrats soit prise en compte pour leur assurer une vie décente, en rapport avec leur statut. Le corollaire est une vigilance permanente vis –à- vis de toute déviation, pour garantir l'intégrité de l'institution.
Les pistes principales sont donc l'indépendance de la justice, son impartialité, sa célérité, sa compétence technique, sa mise à niveau par rapport au droit comparé.
Pour ce faire, elle doit bénéficier d'un recrutement et d'une formation de qualité, de ressources matérielles et humaines conséquentes, d'un revenu garanti mettant à l'abri des tentations, de garanties d'un fonctionnement équitable et impartial.
Pr Nacer Chraibi