Synthèse globale des débats entre le CDM et les Partis Politiques

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 Le Maroc a subi de profondes transformations au cours des dernières années. Même si leur impact n’est pas immédiatement visible, elles conditionnent positivement le futur du pays.

Depuis le gouvernement d’alternance consensuelle de 1998, qui a représenté un tournant politique certain, le pays s’est inscrit dans une orientation de démocratie et de modernité, avec une volonté résolue de corriger les problèmes les plus aigus, au premier rang desquels on peut situer la lutte contre la pauvreté et la précarité.

Les élections de 2002 ont représenté, selon l’avis des observateurs marocains et étrangers, les premières élections libres et transparentes du pays depuis l’indépendance. Il y a eu une neutralité réelle des agents d’autorité dépendant du Ministère de l’Intérieur et un observatoire des élections composé par les ONG marocaines a eu l’autorisation de pratiquer une observation partielle du processus électoral. Il y a bien eu quelques irrégularités dans certains bureaux de vote, et des accusations d’achat de voix, mais le reproche principal envers l’administration, est l’absence de publication des détails des résultats définitifs et officiels jusqu’à ces dernières semaines.

Au cours des deux dernières années, il y a eu une évolution positive marquée par :

 

En ce qui concerne les partis politiques, on peut signaler :

 

La société civile et les élections :

 

En ce qui concerne le programme du Collectif Démocratie et Modernité, il a été articulé autour de trois axes :

1-    participation à toutes les actions visant à la promotion de la démocratie, à la participation et à la mobilisation citoyenne. Ainsi le CDM est membre du comité de pilotage de 2007 DABA, qui a pour objectif de sensibiliser les citoyens à la participation au scrutin de Septembre 2007, à l’intégration des citoyens au sein des partis politiques. De même il est membre du Secrétariat du Collectif Associatif pour l’observation des élections, qui sera présent dans plusieurs milliers de bureaux de vote et veillera sur la transparence du scrutin.

2-    Le deuxième est l’organisation d’une dizaine de débats entre la société civile et les partis politiques, dans les principales villes du Royaume : Casablanca, Rabat, Fès, Meknès, Marrakech, Ksar El Kebir.

3-    Le troisième axe est un projet original visant à démarrer un processus de veille et de monitoring politique.

 

Depuis sa création en 2003, le CDM a organisé une moyenne de dix débats par an, sur des thèmes en relation avec la religion (série intitulée « l’Islam aujourd’hui » ou la démocratie (série intitulée « la démocratie en marche »).

Les débats entre la société civile et les partis politiques organisés au cours des derniers mois rentrent dans le cadre de la deuxième série.

Nous avons choisi de traiter des dossiers importants, en fonction de notre analyse et de notre perspective de la situation du pays, mais rejoignant les choix exprimés par les citoyens marocains dans de nombreuses enquêtes.

Ces débats ont été organisés en partenariat et en collaboration avec d’autres associations de la société civile, particulièrement dans les villes de province.

L’un des objectifs de ces débats était d’amener les citoyens de ces villes à apprendre à organiser des débats autour de thèmes jugés prioritaires pour la ville ou la région.

 

Les thèmes retenus étaient :

 

Parmi les très nombreuses questions enregistrées au cours des débats, nous avons retenu :

 

Concernant les partis politiques :

 

Le programme économique :

Lors des débats, la question de la réforme constitutionnelle et de la définition des pouvoirs du premier ministre et des institutions législative et judiciaire a souvent été posée par le public et par les représentants de certains partis, qui estiment que cette réforme est une étape prioritaire et importante conditionnant le succès de toute réforme dans les autres secteurs.

Le Maroc dispose d’un corpus de lois souvent trop « parfaites » dont l’application est difficile dans le contexte général du pays. Beaucoup de réformes sont envisagées et retenues dans les textes, mais leur applicabilité reste posée. L’une des dernières en date est celle de la déclaration du patrimoine de certains fonctionnaires de l’Etat. A qui est-ce que cette déclaration va être faite ? Que se passera-t-il si un responsable ne la fait pas ? Quelles sanctions seront prises en cas d’abus constaté et comment vont-elles être appliquées ?...

La réforme de la Justice et la lutte contre la corruption font partie du programme de la plupart des partis. Mais à part deux grands partis qui la placent très haut dans leurs priorités, pour les autres, elles constituent plus une déclaration d’intention qu’une foi réelle dans les possibilités d’appliquer cette réforme.

En ce qui concerne la réforme du système éducatif, il est lui aussi présent dans tous les programmes, avec une priorité haute. Mais malheureusement il est considéré comme prioritaire depuis longtemps et cela n’a pas empêché l’éducation de se dégrader régulièrement. Le domaine souffre d’une absence de consensus national sur les objectifs et les ressources, sur les moyens d’évaluation à mettre en œuvre. Il est l’objet de projets contradictoires concernant la ou les langues d’enseignement, la place des langues étrangères, les méthodes pédagogiques à utiliser ; la place de la religion dans les contenus pédagogiques, celle des référentiels universels et de l’apport des autres cultures, …

Pour effectuer les réformes nécessaires, il faut un consensus et une volonté politique qui semblent faire défaut pour l’instant.

Les problèmes liés à l’environnement occupent une place discrète dans les programmes politiques. A l’instar de la communauté internationale, les marocains sont concernés par tout ce qui est en relation avec le développement durable, mais ils sont surtout concernés par les problèmes de pollution de l’air, de l’eau, ou par les décharges des déchets ménagers, qui génèrent des maladies et des décès dont ils aimeraient voir les solutions en priorité haute dans les programmes des partis.

Le rôle de la société civile dans le champ politique et les possibilités de collaboration avec les partis politiques :

La société civile est présente depuis longtemps dans le champ politique. Elle s’est illustrée dans la promotion de la démocratie et des droits de l’Homme. Elle a contribué à l’amélioration du statut de la Femme, au cours d’une longue lutte qui a abouti à la promulgation du Code de la Famille, à la mise en place l’Instance Equité et Réconciliation en matière de justice transitionnelle , de l’Institut Amazigh pour l’affirmation des droits culturels, la reconnaissance de la langue et de la culture Amazigh comme héritage et composantes structurelles de l’identité marocaine. Elle a lutté par ses moyens, contre la corruption, les injustices, la pauvreté

Elle a contribué à animer et enrichir le débat politique (ALTERNATIVES, CDM, FONDATION BOUABID…).

Aujourd’hui elle s’implique dans le champ politique, en partenariat avec les partis, pour sensibiliser et mobiliser les citoyens à la participation au scrutin. Elle contribue en organisant des débats entre les partis et les citoyens, en vue de permettre un échange de vues ; elle est présente dans le processus d’observation et de validation de la transparence des élections ; elle s’est engagée dans un processus de veille et de monitoring politique, détaillé dans le programme du CDM et visant à faire une évaluation et un suivi des promesses électorales.

Il est évident que la société civile et les partis politiques n’ont ni les mêmes attributions institutionnelles, les mêmes prérogatives ou les mêmes ressources. La société civile a une activité qui est complémentaire de celle des partis. Les actions communes se font dans le cadre d’un partenariat négocié et transparent, respectant les attributions de chacun.

Dans cette phase que vit le Maroc, le dynamisme de la société civile constitue un atout supplémentaire en vue de la réussite de la transition démocratique. Les partis politiques l’ont bien compris, en acceptant les offres de collaboration émanant de la société civile, ou en faisant la démarche inverse.

Contrairement à une opinion courante, les activités du CDM ont montré que le citoyen marocain ne se désintéresse pas de la politique. Il est au contraire un observateur attentif impliqué dans l’analyse et l’évaluation des actions dans le champ politique. A chaque fois que l’occasion de participer à un débat leur a été offerte, les citoyens sont venus en grand nombre. Les débats ont souvent été passionnés. Ils ont duré plusieurs heures et dans les questionnaires d’opinion les participants souhaitaient à chaque fois plus d’occasions de débats et plus de temps de parole pour la salle.

Le désintérêt qui est constaté concerne une certaine forme de pratiquer la politique dans notre pays, en raison du manque de communication de l’action gouvernementale, du manque de confiance dans certains partis ou certaines personnalités politiques, et d’une perception incomplète et parfois erronée des prérogatives et de devoirs de chacun.

Ceci témoigne d’un défaut de communication de la part du gouvernement et des partis sur leurs actions pendant les législatures. Ils doivent annoncer des objectifs au début du mandat et faire le bilan des réalisations au fur et à mesure de l’évolution du mandat.

Cela témoigne aussi de l’absence de travail de proximité de certains partis, et du défaut d’encadrement politique des jeunes, tant au sein de la famille, à l’université ou par les partis politiques.

Il est important que la mobilisation actuelle en vue de faire participer davantage les marocains à l’action politique continue après les élections de 2007, sous des formes diverses, en vue de transformer les spectateurs en acteurs et les critiques en citoyens responsables.

Il va de soi qu’une telle démarche n’est concevable que dans le cadre d’une forte reconnaissance de la liberté d’opinion, de la liberté de la presse et des libertés publiques en général qui nécessitent des lois conformes aux normes internationales

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